Mendicité forcée des enfants au Sénégal

Mendicité forcée des enfants au SénégalMaison de la Gare est une organisation non gouvernementale qui vise à lutter contre la mendicité forcée des enfants au Sénégal en réintégrant les enfants talibés dans la société sénégalaise. Les talibés sont de jeunes garçons et filles qui étudient le Coran dans des « daaras » (écoles coraniques résidentielles) non réglementés soutenus par leurs enseignants, connus sous le nom de marabouts. Le plus souvent, les conditions dans lesquelles ces enfants vivent et étudient sont déplorables et les enseignants soumettent souvent les élèves à des actes de maltraitance. Dans les daaras des zones rurales reculées, les enfants manquent d’abris, d’eau, d’installations sanitaires et même de nourriture. Certains enseignants forcent des enfants, parfois dès l’âge de 5 ans, à mendier.

L’Organisation internationale du travail (OIT) considère la mendicité forcée des enfants comme l’une des «pires formes de travail des enfants», car elle constitue une violation des protections fondamentales des droits de l’homme énoncées dans la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant. Human Trafficking Search explique que la mendicité forcée d’enfants est « l’une des formes les plus visibles de traite des êtres humains qui existent : les enfants exploités sont à la vue de tous, impossibles à manquer pour tout piéton passant à proximité ».

Zoom sur la mendicité forcée des enfants au Sénégal

Comme la majorité des daaras ne reçoivent aucun soutien du gouvernement et ne font pas payer la nourriture, l’éducation ou le logement, certains maîtres coraniques forcent leurs élèves à se rattraper en mendiant de la nourriture ou quelques pièces dans les rues du Sénégal. Lorsqu’ils ne respectent pas le quota spécifique pour chaque jour, ces enseignants soumettent les talibés à de graves abus, rapporte Human Rights Watch.

La charité que les enfants reçoivent est transmise à leurs « enseignants » et parfois les restes qu’ils collectent « peuvent être la seule nourriture dont ils disposent toute la journée », selon un article de 2021 de l’écrivain Fatoumata Ouedrago.

Les estimations de Maison de la Gare situent le nombre d’enfants mendiants forcés au Sénégal à environ 15 000. « Ces garçons sont battus pour se soumettre, punis pour avoir tenté de s’enfuir et privés de tous les droits humains fondamentaux par leurs agresseurs. »

Pour les familles aux prises avec la pauvreté, envoyer leurs enfants dans des daaras est parfois une solution à certains de leurs problèmes financiers – cela offre une éducation gratuite à leurs enfants mais a également un sens logistique car souvent l’école choisie est proche de leur domicile familial.

Espoir pour l’avenir

Des organisations comme Maison de la Gare s’attaquent à la mendicité forcée des enfants à Saint Louis, au Sénégal, en donnant accès à une éducation adéquate dans un environnement stimulant et à des compétences pédagogiques qui aident les enfants à être bien équipés pour leur avenir.

L’organisation a commencé son travail en 2007 et a créé un centre communautaire financé par des donateurs internationaux. Sa mission est exigeante et ardue mais pas impossible. L’objectif principal est d’intégrer les talibés dans le « système scolaire formel et de les préparer à devenir des membres productifs de la société sénégalaise ».

Pour y parvenir, Maison de la Gare dispense « des cours d’alphabétisation, des cours d’hygiène et un soutien nutritionnel », fournit des soins médicaux vitaux auxquels les talibés n’ont pas accès et développe des programmes d’apprentissage pour les enfants plus âgés.

Efforts de plaidoyer pour mettre fin à la mendicité des enfants au Sénégal

Maison de la Gare fait pression pour mettre fin aux abus et à l’exploitation auxquels sont confrontés les talibés et « travaille pour en faire une question centrale du débat politique tant au Sénégal qu’à l’international », selon son site Internet. Pour atteindre ces objectifs, Maison de la Gare s’efforce d’établir des « relations de collaboration » avec d’autres ONG, les autorités gouvernementales et, surtout, « avec les marabouts qui sont la clé pour réaliser un vrai changement ».

Dans le cadre de la campagne « Espoir pour les enfants talibés mendiants », l’organisation a réussi à amasser plus de 190 000 dollars pour financer ses efforts de soutien aux enfants grâce à son centre d’accueil, construit en 2010.

Selon son rapport annuel, en 2021, Maison de la Gare a accueilli 128 talibés, réintégré 50 enfants et réuni 58 autres avec leurs familles. Chaque mois, l’association dispense des soins médicaux à 195 enfants et équipe 102 daaras en kits d’hygiène.

Regarder vers l’avant

L’esclavage moderne se produit dans presque tous les pays du monde, mais il est plus répandu dans les pays où les taux de pauvreté sont élevés. Selon les estimations de la Banque mondiale, 9,3 % de la population sénégalaise vivait sous le seuil de pauvreté de 2,15 dollars par personne et par jour en 2018.

La forme d’esclavage la plus répandue au Sénégal prend la forme de la mendicité forcée des enfants et est le résultat de « l’inaction du gouvernement, des traditions déformées et des familles désespérées », souligne Ouedrago dans sa publication.

En plus de fournir des programmes éducatifs, Maison de la Gare estime que pour réduire de manière significative le nombre d’enfants talibés mendiants, l’État devrait introduire des daaras réglementés modernes et améliorer l’application de la législation existante contre la mendicité forcée.

– Ralitsa Pashkuleva
Photo : Flickr

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