Jardiner en temps de conflit : semer des graines d’espoir dans les zones de guerre

Jardiner en temps de conflitLe jardinage en temps de conflit offre un antidote vital : la plantation de graines est analogue à la transformation de vies déracinées par la destruction. Les jardins offrent à la fois un soulagement symbolique et des récompenses tangibles aux citoyens qui sont aux prises avec la réalité de la dévastation environnementale et du déplacement. Le Journal of Alzheimer's Disease Reports a constaté que le jardinage favorise la réminiscence et le sentiment d'identité, dotant les communautés et les individus d'un but.

Jardiner en temps de conflit

Partout dans le monde, des communautés cultivent des terres et des avenirs alternatifs au lendemain d'une guerre. La correspondante de guerre Lalage Snow décrit la désensibilisation associée aux conflits, soulignant la gratuité de la destruction dans son livre War Gardens: A Journey Through Conflict in Search of Calm.

Mais cette désensibilisation est remise en cause par des projets communautaires dans des régions autrefois marquées par la guerre. Du Burkina Faso à l’Afghanistan, les jardiniers affichent leur foi en l’avenir en plantant des graines qui survivront aux conflits. Trois projets illustrent particulièrement ce sentiment et démontrent que les jardins peuvent non seulement fournir un moyen de survie, mais aussi un refuge dans un contexte de troubles.

Le projet RECOSA au Burkina Faso

Près de 1,9 million de personnes cherchent désormais refuge dans différentes régions du Burkina Faso, alors que des groupes armés ont pris le contrôle de régions entières du pays. La fermeture de 6 000 écoles et l’insécurité alimentaire croissante s’accompagnent d’un sentiment de déconnexion avec la terre et le patrimoine personnels.

Initié par la Croix-Rouge et Handicap International, le projet de jardins RECOSA s’attaque à ces problèmes en créant des espaces partagés pour la culture de plantes et de fleurs. À Sebba, la cohésion sociale se développe grâce aux jardins communautaires. Les populations transfrontalières sont particulièrement vulnérables aux dislocations sociales, vivant dans un lieu caractérisé par des mouvements transitoires de personnes. Soixante-quinze ménages de Sebba ont appris à créer des jardins partagés, ce qui a transformé les personnes en situation d’insécurité alimentaire et isolées de leur communauté.

Jardin Chihilsitoon à Kaboul

Le jardin Chihilsitoon, comme une grande partie de l’Afghanistan, a souffert de la guerre civile des années 1990. Il est resté en ruines, vestige des pillages et des destructions, pendant 25 ans. Cependant, en 2015, l’Aga Khan Trust for Culture a restauré le jardin Chihilsitoon de 12,5 hectares pour lui redonner sa gloire d’antan. En plantant 5 000 nouveaux arbres et en peuplant le parc de fleurs indigènes des collines voisines, cet espace est devenu un sanctuaire pour les citoyens de Kaboul.

Cet aménagement paysager drastique a créé des opportunités multiformes pour ceux qui se remettent encore des troubles de la guerre et de l'occupation. Les voies navigables et les sentiers, depuis longtemps perdus sous les décombres du conflit, ont été récupérés pour former des sentiers reliant diverses expériences spatiales. Le pique-nique et un amphithéâtre sont reliés par des sentiers bordés de fleurs désormais entretenues par une équipe d'agriculteurs afghans.

Le jardin réhabilité offre aux citoyens un sanctuaire pour socialiser et nouer de nouvelles relations avec un lieu autrefois souillé par la guerre. La préservation des espaces verts restaure la culture et l'histoire sociale afghanes ; la plantation de fleurs indigènes remplace les anciennes dévastations.

Depuis sa restauration, le jardin attire chaque année plus de 400 000 visiteurs. La transformation d’une ancienne zone de guerre en sanctuaire de verdure a redonné espoir aux Afghans.

Jardinage dans la zone de guerre de Kharkiv

Alla Olkhovska vit à 30 kilomètres au sud de la frontière russo-ukrainienne, à Kharkiv, en Ukraine. Confrontée quotidiennement aux sirènes des raids aériens, qui lui rappellent le champ de bataille qui l'entoure, elle cherche du réconfort dans les fleurs et les arbres de son jardin. N'ayant pas les moyens de fuir le pays après l'invasion russe, elle a cherché refuge dans les clématites et les fleurs sauvages. Son travail remarquable a attiré l'attention internationale, ce qui lui a permis de réaliser un documentaire, Gardening in a War Zone.

Le documentaire montre ses talents d'horticultrice et la thérapie qu'elle trouve dans le soin de ses plantes. À un moment donné, elle admire les jeunes plants qu'elle tient dans sa main et la capacité de tenir plusieurs vies et vies futures dans une seule main. Ce sentiment offre un soulagement dans un contexte de conflit qui menace de détruire l'avenir d'une génération.

Le travail d'Alla a également donné naissance à un livre, Clematis, qui explique comment cultiver au mieux cette fleur. Dans un message adressé au lecteur, Alla explique que l'écriture de ce livre pendant la guerre a été particulièrement éprouvante et que, confrontée à des « attaques de missiles constantes » et à un état psychologique instable, les conditions d'écriture étaient loin d'être idéales. Pourtant, sa passion pour le jardinage a couvert le hurlement des sirènes au loin. Cela lui a donné un sens à sa vie, l'aidant à se transformer en espoir pour sa nation.

Même si la réalité de la guerre ne peut être ignorée, elle refuse d'accepter la défaite face à la vie que l'on trouve dans les plantes au quotidien. Son histoire témoigne du pouvoir des jardins qui nous rappellent que la vie nouvelle prévaudra malgré les menaces imminentes.

Jardiner en temps de conflit : réflexions finales

Cultiver des graines ne produit pas seulement des plantes : chaque plantule engendre un nouvel espoir et une nouvelle autonomie. Jardiner en temps de conflit offre une cohésion sociale. Mais cela témoigne aussi de la force de caractère humaine et d’une capacité remarquable à voir le potentiel d’espaces autrefois menacés par la guerre.

Lucy est basée au Royaume-Uni et se concentre sur les bonnes nouvelles pour le projet Borgen.

*