Le président Arce et son plan pour le développement de la Bolivie

Président Arcé
Le 21 septembre 2022, le président de la Bolivie, Arce Catacora, a donné une conférence à l’Université de Yale avant de participer à la réunion de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York. S’adressant à une petite salle d’étudiants et de professeurs, le président Arce a présenté les données macroéconomiques des 20 dernières années de la Bolivie, notant les succès des 15 années de règne de son parti politique, le Movimento al Socialismo (MAS). Tout au long de sa conférence, il a mis l’accent sur l’extraction des ressources en tant que principal moteur de la croissance à court et à long terme du pays.

À propos du président Arce

Le président Arce a commencé sur un ton festif, comparant les succès du modèle socialiste du MAS par rapport au « modèle néolibéraliste » qui existait avant lui. Il a noté qu’entre 2006 et 2019, les années où son parti était au pouvoir, le PIB par habitant avait augmenté de 4,7 % contre 3 % de 1985 à 2005. Il a également évoqué le succès de la Bolivie dans la répartition équitable de ces gains, augmentant ainsi le revenu de la les 40% inférieurs de 12,5% et adoptant ce qu’il a qualifié de «démocratisation de l’économie».

En outre, il a souligné la stabilité financière de la Bolivie, soulignant les faibles niveaux de dette extérieure du pays. S’appuyant sur les données recueillies par la banque centrale, le président Arce a attiré l’attention de la foule sur la dette publique extérieure avant la présidence d’Evo Morales du MAS, qui a atteint un sommet historique de 63 % du PIB en 2003. Il a ensuite noté qu’après 2006, La dette extérieure de la Bolivie n’a jamais dépassé 33 %, se situant à 28,9 % du PIB sous son administration.

Répondant aux critiques de son « modèle productif économique social communautaire », il a souligné la croissance continue des entreprises en Bolivie comme un signe de développement durable. À partir de 2005, la Bolivie a vu plus de 250 000 entreprises naître au cours de 14 ans, avec une croissance plus faible pendant les années pandémiques. Faisant tout son possible pour répondre aux préoccupations concernant l’investissement privé dans le cadre du modèle socialiste, il a affirmé que la Bolivie avait trouvé un moyen viable de mélanger l’implication de l’État dans l’économie avec l’esprit d’entreprise.

Les défis de la Bolivie

Bien que la présentation d’Arce ait dépeint les 20 dernières années sur un ton extrêmement positif, elle a omis de nombreux défis auxquels la Bolivie est confrontée. Bien que son modèle soit basé sur l’extraction des ressources naturelles, la principale ressource de la Bolivie étant le gaz naturel, cela ne peut pas suivre le taux de croissance de l’économie bolivienne. En effet, la Bolivie est déjà devenue importatrice nette d’hydrocarbures, à un moment où les prix de l’énergie atteignent des sommets historiques.

L’environnement

En outre, la Bolivie est aux prises avec de nombreux problèmes environnementaux, notamment la mauvaise gestion de sa partie de la forêt amazonienne. Le président Arce a annoncé en juillet 2022 qu’il investirait dans l’huile de palme pour augmenter la production énergétique du pays, ce qui est à la fois inefficace et nocif pour l’environnement. De plus, l’administration d’Arce n’a pas fait grand-chose pour étouffer les incendies massifs dans la région de Chiquitania en Bolivie, et son prédécesseur politique Evo Morales a en fait signé un décret en 2019 facilitant l’exploitation des terres par l’agro-industrie. On est bien loin de son discours de Yale, dans lequel il promettait de « respecter la terre mère » après une question d’un membre du corps professoral.

Questions relatives aux droits de l’homme

Enfin, et peut-être le plus important, les actions douteuses de la Bolivie concernant les droits de l’homme en Bolivie et en Amérique du Sud menacent de saper toute idée de succès. Au cours des questions qui ont suivi la présentation, on a demandé au président Arce comment la Bolivie pouvait prétendre soutenir les droits de l’homme tout en restant en bons termes avec le président vénézuélien Nicolas Maduro, même au milieu des violations des droits de l’homme. Sa réponse, vague et évasive, n’a pas caché le fait que la Bolivie continue d’entretenir des liens étroits avec le Venezuela, choisissant même de se retirer d’une conférence régionale si le Venezuela ne recevait pas l’autorisation d’y assister.

Le système judiciaire

Même en Bolivie, d’autres ont accusé Arce et son parti de trafiquer le système judiciaire à des fins politiques. En juin 2022, l’ancienne présidente par intérim, Jeanine Anez, a été condamnée à 10 ans de prison pour avoir fomenté un coup d’État, malgré son ascension à la Cour suprême bolivienne qui a confirmé le président. Les procureurs affirment qu’elle faisait partie d’un plan visant à destituer le président Evo Morales de ses fonctions en 2019, malgré le fait qu’elle n’ait pas participé aux manifestations largement pacifiques qui ont conduit à sa démission. Anez affirme que son emprisonnement est une affaire purement politique, destinée à légitimer le MAS après sa chute du pouvoir après avoir prétendument commis une fraude pour remporter l’élection présidentielle de 2019.

Regarder vers l’avant

Le modèle économique du président Arce a prouvé qu’il peut réussir, et sa présentation témoigne du fait que la croissance de la Bolivie sous près de 20 ans de règne du MAS a été vraiment sans précédent. Cependant, cela n’enlève rien à l’avenir trouble de la Bolivie et à son bilan douteux en matière de droits de l’homme. Le pays a le potentiel économique de se développer fortement, mais des protections politiques et environnementales fortes restent encore incertaines.

Samuel Bowles
Photo : Flickr

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